Désirs inavouables: roman

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Désirs inavouables: roman
petite ville de Meridian. Il y arriverait avec une journée d'avance, exactement ce qu'il voulait. En marchant posément, il traversa le carrefour, noyé dans le flot d'employés et de vendeuses qui se rendaient à leur travail.
    Un front tropical s'était installé; cette troisième semaine de mai, la chaleur était étonnamment lourde et humide. Pas de différence, pensa-t-il, avec le temps de La Nouvelle-Orléans. Mais il n'y prêta pas attention. Pour Beecham, les choses étaient toujours toutes à peu près semblables.
    Les magasins commençaient à ouvrir, des lumières appa-raissaient derrière les grandes vitrines. Il passa devant celle d'un joaillier o˘ un homme disposait des montres, devant une boutique de mode avec des mannequins hautains, un grand magasin o˘ de multiples exemplaires d'un même produit composaient tout un étalage. Un frisson remonta le long de son dos jusqu'à la racine de ses cheveux. Il s'arrêta et regarda autour de lui, toujours prudent et méfiant, pour voir si par hasard il était suivi, mais personne n'était à ses trousses, il ne s'était rien produit d'anormal.
    quand il tourna à nouveau la tête, il se vit reflété à l'infini dans un mur de petites lunettes à fine monture métallique, comme celles que portait autrefois sa grand-mère. Ce fut comme si son passé le rattrapait. Elle aurait presque pu être là, à le contempler cent fois. VOYEZ MIEUX! disait un panneau publicitaire. VOYEZ PLUS ! TOUTES TAILLES, TOUS
    STYLES. AU CHOIX... $ 9,95. L'idée lui vint que des lunettes pourraient apporter la touche finale à son déguisement. S'il trouvait des verres neutres, cela adoucirait sans doute la noirceur pénétrante de ses yeux. Il estima que cela valait la peine d'essayer et entra dans le magasin.
    Deux jours plus tard, dans la petite ville de Meridian, un homme poussa la porte du Delaney's Tap & Dine et entra.
    C'était un individu de taille moyenne, vêtu d'une tenue de travail délavée, propre mais un peu humide à cause de la chaleur écrasante. Il avait un journal plié sous le bras et portait de petites lunettes à fine monture métallique. Les verres s'embuèrent aussitôt à cause de la climatisation de la salle. Pendant quelques instants, il resta sur le seuil, ses yeux noirs regardant de tous côtés derrière les ovales embués. Il ôta alors ses lunettes, les essuya avec son mouchoir et les remit sur son nez.
    Il était près de 16 heures, le moment creux de la journée chez Delaney. Le barman jeta un coup d'oeil au nouveau venu et retourna aux mots croisés du LA. Times. Au bruit que fit la porte en se fermant, les quelques clients du comptoir tournèrent la tête puis ils s'intéressèrent de nouveau à la dernière phase du match Dodgers-Phillies.
    Tout, même le bruit de la télévision, lui paraissait assourdi, comme le lointain bourdonnement d'une scie. Beecham regarda sa montre : 15 h 56. quatre minutes d'avance.
    Il se dirigea vers le restaurant désert, au fond de la longue

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