CH…RI-BIBI ET C…CILY
Premières aventures de Chéri-Bibi, Il
(1913)
"LA MORUE A L'ESPAGNOLE "
[email protected]@tiD 5b P,5lLjlfI5v£ Cinq mois après les événements que nous venons de raconter, dans
l,es Cages jlottantes, la Ficelle, qui avait six millions dans sa malle,
débarquait à Palmerston, petite capitale naissante du territoire du nord,
dans l'Australie septentrionale. Un bon port, quelques baraques, quelques
églises et temples en bois, quelques maisons en briques; la Ficelle ne
s'arrêta point aux beautés du paysage.
Il lui avait semblé apercevoir, au
loin, sur rade, un gros navire à l'ancre qui ressemblait à l'Estrella;
cependant il n'en avait pas reconnu les dernières couleurs. Depuis son
départ, le transport avait peut-être changé plusieurs fois d'habits, de
pavillon, de nom. quelles avaient été
ses aventures? Ah! quelles nouvelles
attendaient le pauvre la Ficelle?
Après avoir déposé son bagage à
l'hôtel, il courut à la poste et il en
sortit avec une lettre à l'adresse qui lui avait été indiquée quand il se
heurta à un gros petit homme qui lui roulait entre ses jambes:
" Petit-Bon-Dieu 1
- La Ficelle!
- Ah 1 bien, mon vieux! On se retrouve!
Vite! des nouvelles de Chéri-
Bibi!
- Parle-moi d'abord des tiennes... «a a marché l'opération?
-
Oui, je suis paré. Mais Chéri-Bibi, je te demande?
-
Du moment que tu as réussi, fit Petit-Bon-Dieu, ce sera pour nous tous une grande consolation.
- Chéri-Bibi, je te demande?
- Chéri-Bibi est mort, mon pauvre vieux!"
La Ficelle lui tomba dans les bras.
Il avait reçu le coup au coeur. Petit-
Bon-Dieu lui donna des soins énergiques et, quand il rouvrit les yeux -
"O˘ est ton bagage?
- A l'hôtel!
- Et les millions ?
- A l'hôtel aussi!
- Eh bien! mon vieux, t'as pas peur! Eh bien! quoi! tu ne vas pas tourner de l'oeil, peut-être! T'as donc pas de sang dans les veines! "
Il le porta plus qu'il ne le conduisit à l'hôtel, le seul de Palmerston o˘
pouvait descendre un voyageur qui avait, dans sa malle, des millions.
Petit-Bon-Dieu eut vite fait de commander une charrette. Il ne quittait pas les malles des yeux. Le bagage fut descendu, sur son ordre, dans une chaloupe o˘ la Ficelle se laissa glisser plus mort que vif.
" Nagez! " commanda Petit-Bon-Dieu aux matelots qui l'attendaient.
La chaloupe sortit du port et se dirigea vers la haute rade.
"T'as bien fait de pas perdre de temps. T'arriveras pour son enterrement! " fit Petit-Bon-Dieu.
La Ficelle leva les yeux au ciel et pleura en silence.
"Son enterrement, c'est une façon de parler, dit Petit-Bon-Dieu, attendu qu'on va reprendre la mer pour pouvoir le jeter tranquillement à l'eau sans que les autorités s ' 'en mêlent! T'as compris? Tu sais... on est toujours f‚ché avec les autorités. De ce côté-là il n'y a rien de changé.
Mais réponds-moi! T'as pas fini de pleurer comme un veau!
- qué malheur! soupira la Ficelle. Si je n'avais pas raté le dernier bateau